Association des Écoles d’Études Politiques du Conseil de l’Europe

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(Original anglais - Seul le texte prononcé fait foi)

Université d'été pour la démocratie
Ecoles d’études politiques

Discours de clôture de Terry DAVIS, Secrétaire Général du Conseil de l'Europe

Strasbourg, 10-14 juillet 2006

J’espère que vous avez terminé votre shopping car tous les magasins sont fermés aujourd’hui. La France célèbre sa Fête nationale, qui marque la prise du symbole haï de l’oppression d’un régime autocratique, la prison de la Bastille, à Paris, le 14 juillet 1789.

Les commémorations sont des ponts entre notre mémoire et le passé. Elles nous permettent de nous souvenir, de réfléchir et d’apprendre. Les lendemains de la Révolution française ont été marqués par l’alternance entre l’espoir et la frustration, les progrès des Lumières et l’horreur de la guillotine. Le 14 juillet est certes une fête nationale française, mais la révolution a laissé son empreinte sur l’histoire de l’humanité. Le premier article de la Déclaration des droits de l’homme et des citoyens dit : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits… ». Vous remarquerez que nous avons essayé d’étendre ce privilège aux femmes depuis deux cents ans.

Dans les jours à venir, nous célébrerons aussi le 70e anniversaire du début de la guerre civile en Espagne. Cette guerre restera pour toujours dans nos mémoires en raison du sort tragique de Guernica – une petite ville du Pays basque bombardée par l’aviation nazie – et aussi en raison des décennies de répression qui ont suivi la victoire du régime franquiste.

C’est du moins la façon dont l’Europe civilisée et éclairée se souvient de ces événements. Certains responsables politiques ont récemment exprimé des points de vue très différents – soit dit en passant, ils l’ont fait dans le bâtiment qui se trouve de l’autre côté de la rivière – mais tout ce qu’ils ont réussi à faire est de se ridiculiser eux-mêmes plutôt que d’offenser sérieusement quelqu’un d’autre.

En novembre, nous commémorerons également la répression brutale d’une tentative visant à transformer le communisme en socialisme démocratique. Je fais allusion à ce qui s’est passé à Budapest il y a 50 ans.
La mi-juillet marque aussi l’anniversaire d’une autre page sombre de l’histoire européenne récente. Il y a 11 ans, à Srebrenica, plusieurs milliers d’Européens ont été sauvagement assassinés par leurs concitoyens.

En moins de six décennies, de Guernica à Srebrenica, l’Europe a connu des hauts et des bas. Elle a été à l’origine d’une terrible guerre mondiale et a vécu l’holocauste. Elle s’est relevée de ses cendres uniquement pour se diviser idéologiquement. Dans le même temps, les Européens ont réussi à réconcilier des peuples qui étaient des ennemis – par intermittence – depuis cent ans et ont également lancé la tentative la plus inspirée que le monde ait jamais connu d’unité et de coopération à l’échelle d’un continent, pour vivre à nouveau plusieurs guerres, peut-être plus limitées quant à leur ampleur, mais largement comparables pour ce qui est de la sauvagerie et de la destruction aveugle.

Tout cela nous envoie un message.

L’histoire n’est pas une progression linéaire. Elle va de l’avant et traverse parfois des périodes remarquables de raison et d’humanité, pour mieux retomber, le moment d’après, dans la terreur, l’obscurantisme et la bêtise.

La liberté – dans son sens le plus large qui est d’être libre de toute oppression, exclusion et discrimination – est extrêmement importante et extrêmement vulnérable.

Nous aurons beau – et nous devons le faire – étendre cette liberté et renforcer nos défenses et garanties, nous ne pourrons jamais atteindre l’immunité totale face aux menaces qui pèsent sur la démocratie et les droits de l’homme.

La liberté peut parfois disparaître brutalement. Mais le plus souvent, ce processus est lent dans le temps, la liberté s’estompant petit à petit, tout d’abord sans que cela ne se remarque, jusqu’à ce qu’il soit tard, voire trop tard, pour pouvoir agir.

Notre propre liberté se définit par rapport aux libertés d’autrui. Nous ne sommes pas forcément Roms, ni Juifs, ni Musulmans, ni membres de toute autre minorité ethnique ou religieuse. Nous ne sommes peut-être pas des handicapés, des immigrés ni des gays ou lesbiennes, des chômeurs ou des bénéficiaires d’une aide sociale, ni des mères célibataires sans ressources, mais si nos concitoyens appartenant à ces groupes ne sont pas libres, s’ils ne sont pas protégés de toute discrimination et s’ils ne sont pas respectés, nous serons emprisonnés avec eux. La liberté ne peut pas être découpée en tranches pour une consommation individuelle.

Vous êtes tous présents ici en raison de votre engagement pour défendre et étendre cette liberté, et en raison de votre détermination à protéger et à promouvoir la démocratie, à étendre les droits de l’homme et à défendre l’Etat de droit. J’espère seulement que le temps et les efforts que vous avez investis dans les écoles d’études politiques et votre visite à Strasbourg dans le cadre de cette université d’été vous aideront et vous inspireront.

Je vous remercie.

 
 
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